Alors que KTM lutte pour sa survie financière et peine à relancer ses lignes de production, un conflit au sommet du groupe vient aggraver la situation. Le patron historique Stefan Pierer est désormais en guerre ouverte avec son propre conseiller en restructuration, Stephan Zöchling, au sujet d’un prêt de 80 millions d’euros. Une affaire qui pourrait peser lourd sur l’avenir de la marque autrichienne.
Une affaire d'argent… et de pouvoir au sommet qui commence à ressembler à une farce de mauvais gout
L’histoire débute à l’automne 2024 : la holding Dabepo AG, dirigée par Stephan Zöchling, accorde un prêt de 80 millions d’euros à une filiale du groupe Pierer. En contrepartie, des actions de Pierer Industrie AG – maison mère de KTM – sont mises en gage. Le remboursement est prévu pour fin juin 2025.
Mais selon le site allemand Motorradonline.de, en mai 2025, Zöchling accuse Pierer d’avoir violé le contrat. Ce dernier aurait omis d’informer le partenaire indien Bajaj – coactionnaire à 49,9 % de Pierer Mobility AG – de ses droits de préemption ou d’option de vente sur les actions mises en garantie. Un oubli que Zöchling interprète comme une rupture de contrat. Il tente alors de revendre les actions gagées, ce que Pierer cherche à bloquer à tout prix, redoutant de perdre le contrôle de KTM.
L’affaire prend un tournant encore plus troublant quand on sait que Stephan Zöchling est lui-même membre du directoire de Pierer Industrie AG depuis le 1er janvier 2025, et surtout président du conseil de surveillance de Pierer Mobility AG. Autrement dit, l’homme qui veut vendre les actions de la maison mère est aussi censé en surveiller la bonne gouvernance…
Stephan Zöchling occupe les fonctions de président du conseil de surveillance de Pierer Mobility AG depuis de 1er janvier 2025 et réclament le remboursement de son prêt de 80 millions
Pierer contre-attaque en justice (son propre conseiller en restructuration ...)
Le 6 mai, Stefan Pierer réagit en déposant plainte au tribunal de commerce de Vienne pour empêcher la vente. Il affirme que le prêt n’est pas encore arrivé à échéance et que Zöchling n’a aucun droit sur les actions en garantie. Le patron de KTM évoque une tentative de pression injustifiée, à quelques semaines d’une échéance capitale pour l’entreprise.
Car c’est bien là tout l’enjeu : d’ici au 23 mai 2025, KTM doit réunir 600 millions d’euros pour rembourser 30 % de sa dette colossale (2 milliards d’euros). Sans cette levée de fonds, le plan de restructuration du groupe pourrait échouer, avec des conséquences dramatiques sur la production, la R&D et les équipes compétition, notamment en enduro et motocross.
Qui est qui dans cette nouvelle crise chez KTM ?
Nom | Rôle / Fonction |
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Stefan Pierer | Fondateur et ex-PDG de KTM ; toujours influent dans Pierer Mobility et Pierer Industrie. |
Stephan Zöchling | Président du conseil de surveillance de Pierer Mobility ; expert en restructuration ; PDG de REMUS Holding GmbH |
Bajaj Auto | Groupe indien ; actionnaire à 49,9 % de Pierer Mobility ; partenaire stratégique majeur. |
Chronologie de la crise
Date | Événement |
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Octobre 2024 | Prêt de 80 M€ consenti par Zöchling à une filiale du groupe Pierer, garanti par des actions. |
Février 2025 | Stefan Pierer quitte la direction de KTM mais conserve une influence stratégique. |
Avril 2025 | KTM obtient l’accord judiciaire pour son plan de restructuration. |
Mai 2025 | Zöchling tente de vendre les actions mises en gage ; Pierer réagit en justice. |
23 mai 2025 | Échéance majeure : KTM doit réunir 600 M€ pour rembourser ses créanciers. |
Une crise KTM aux multiples facettes
Ce conflit juridique met en lumière les failles de gouvernance et les guerres de pouvoir au sein groupe Pierer. Rappelons que :
- La production KTM est à l’arrêt, avec une reprise envisagée au 27 juillet 2025.
- Bajaj, actionnaire à 49,9 %, observe la situation avec inquiétude.
- Les marques associées – Husqvarna, GASGAS, WP, Remus – sont directement concernées.
Pour les revendeurs, clients et passionnés d’enduro, cette instabilité pose question : quid des garanties ? Des livraisons ? Du soutien aux teams ?
Ce bras de fer financier entre deux figures clés du groupe KTM n’aurait pas pu tomber plus mal. En pleine restructuration industrielle, avec une production en pause et un avenir suspendu à une levée de fonds massive, la marque orange traverse l’une des périodes les plus critiques de son histoire. Pour les fans d’enduro, de motocross, l’espoir reste que KTM sorte renforcée de cette épreuve — à condition que la tempête juridique au sommet ne coule pas le navire.