Essai longue durée BETA 300 RR 2023

Une moto smooth 

Suite à des expériences plus que mitigées au guidon de 300 2 temps, que je trouvais généralement trop violant, trop brutaux, trop exigeant physiquement (que ce soient des 300 à carburateur ou injection), j'avais rangé les 300 cm³ dans la catégorie des cylindrées à réserver aux pilotes expérimentés (disposant d'une bonne technique et d'un bon physique). Avec un 300 mal maitrisé, la sanction arrive vite si on est trop généreux et imprécis les gaz. Mais au terme de ces 6 mois au guidon l'italienne, je me suis réconcilié avec les 300 cc grâce à cette Beta qui est l'exact opposé d'une moto violente.

En route pour 9 mois de test au guidon de l'Italienne

Cette 300RR 2023, se caractérise avant tout par un moteur extrêmement linéaire et docile. C'était même un peu perturbant au début, car j'avais du mail à croire que c'était bien un 300 2 temps, tellement la réponse a 'l'ouverture des gaz est exemplaire de douceur. Les amateurs de sensations fortes et de coup de pied au cul à l'ouverture des valves resteront peut-être sur leur faim, mais moi perso, j'adore cette linéarité. Ça fait de la  300 Beta une arme de facilité et d'efficacité lorsque les conditions de roulage se durcissent ou que le terrain devient glissant. À bas régime, c'est souple, ça ne cogne pas et on peut laisser descente dans les tours vraiment très bas sans risques de caler.  À mi-régime, on retrouve la vivacité des 300, mais sans la violence liée à l'ouverture des valves. Les montées en régime, même si elles sont vives, n'en restent pas moins très linéaires. 

Cette  300 est incroyablement linéaire et facile (assez incroyable pour un 300 2 temps) et ne nécessite pas une main experte pour le maitriser.

Dans les singles, la Beta 300 RR 2023 est absolument magique, car on se cale en 3 (ou en 4 si c'est dégagé)  et il n'y a plus qu'à enrouler sans changer de vitesse (et sans toucher à l'embrayage) car son moteur reprend facilement quelle que soit la vitesse engagée. Comme en plus la moto est super agile et que son poids est contenu (110 kg) il n'y a presque pas d'inertie, donc on ne force pas pour la placer comme on veut. 

N'allait pas non plus croire que cette 300 Beta est anémique, car quand vous tournez la poignée droite, ça reste un 300 avec de puissance de revendre. Mais le truc, c'est que la linéaire exemplaire de ce moteur rend ce surcroit de puissance (par rapport à une 250 2T par exemple) parfaitement contrôlable par le commun des mortels.

Cette 300 est tellement linéaire que j'ai trouvé qu'elle manquait même un petit peu de force à la relance en sortie de virage. Pour compenser ça, j'ai monté une couronne avec une dent de plus.  Pour mon pilotage, c'est le bon compromis, car avec cette démultiplication (14×49) on conserve la linéarité exemplaire tout en gagnant un peu de force dans les relances (si vous souhaitez encore plus de force, mettez deux dents supplémentaires, mais au risque de perdre en linéarité).

C'est la seule modification que j'aie faite pour adapter le comportement moteur à mes goûts. Je n'ai même pas eu besoin de toucher à la carburation d'origine. Alors qu'avec certaine moto 2 temps, il faut ajuster la carburation régulièrement, là paradoxalement, je n'ai rien fait et j'ai trouvé qu'elle était parfaitement adaptée à mes conditions de roulage (chaud ou froid, humide ou sec ou légère altitude). J'ai juste dû à l'entrée de l'hiver toucher d'un demi-tour la vis d'air, car je trouvais le ralenti instable par temps très froid (moins de 5 ° c).

À noter que si vous volez encore plus personnaliser le comportement du moteur, vous avez la possibilité de régler l'ouverture des valves d'échappement. Perso, je n'ai pas ressenti le besoin de jouer sur ça, car le réglage des valves d'usine me semble pertinent et le plus polyvalent pour garder une moto facile.  Probablement qu'en mode compétition, on pourrait essayer de jouer sur cette ouverture des valves pour donner encore plus de force/vivacité aux reprises à bas et mi-régime (en sortie de virage). Mais en mode rando/ballade, pas la peine d'aller se perdre dans des réglages de valve approximatifs qui risquerait de dégrader la facilité exceptionnelle de ce moteur. 

Monter 1 couronne avec 1 dent de plus pour gagner en vivacité dans les relances à bas et mi-régimes

Le commutateur de cartographie sur la Beta est également une bonne chose sans être exceptionnel non plus, car la différence entre les 2 maps n'est pas assez sensible. La map pluie/boue adoucit un peu les hauts régimes et pourra être utile sur les terrains gras, tandis que la carte sec/soleil vous donne toute la puissance dont vous avez besoin (perso, c'est la map que j'ai utilisé 99,9 % de temps).

Coté freinage, le duo Nissing/Galfer fonctionne parfaitement, ça freine fort. Certains lui reprocheront même parfois un frein avant trop mordant, mais moi, on aime bien ce type de freinage puissant de l'avant. (Je regrette juste la dureté excessive du levier de frein avant).

Pour l'entretien, il est facile d'intervenir sur la Beta. Il y a de la place autour du moteur, les plastiques sont simples à démonter et il n'y rien qui gêne pour les opérations d'entretien. La dépose de la selle sans outil et l'accès rapide au filtre à air (aussi sans outils) sont appréciables. 

Partie cycle et suspensions

Sur le plan ergonomique, il n'y a rien à redire.  La position est plutôt neutre, une moto fine entre les jambes, légère, ou l'on se sent à l'aise immédiatement. Ce qui caractérise cette Beta c'est sa facilité à la placer où l'on veut. À son guidon, on ne force pas. La partie cycle de la 300 est à la fois très maniable dans le sinueux et stable dans la rapide. Un comportement finalement très sain qui ne vous prendra pas en défaut avec des réactions bizarres (sur l'angle par exemple ça ne décroche pas intempestivement). Et ce d'autant plus que ce châssis est bien secondé par une fourche ZF dont le comporte est en progrès sur le millésime.  Autant en 2022 la ZF tapait dans les bras sur les petits chocs, autant avec les nouveaux setting (la géométrie des passages d'huile autour du piston a été modifiée) de la 2023 Beta est parvenue à gommer cela. La fourche est maintenant plus onctueuse en début de course (c'est à mon avis ce qui contribue aussi à rendre la moto aussi agréable et maniable dans le sinueux).

Dans les cailloux, la 2023 sautille moins qu'avant et logiquement ça file donc un peu plus droit. À mon goût, jusqu'à mi-course, il n'y a pas grand-chose à lui reprocher. Passé ce cap de la mi-course, je trouve la fourche un peu trop souple. Dit autrement, elle méritait de durcir plus rapidement et fermement sur les gros chocs. Cela rendait la moto encore plus sécurisante à haute vitesse et par exemple plus confortable sur les grosses marches en descente ou on a vite fait de talonner. Mais si je fais un résumé de mes impressions sur cet essai longue durée, le bilan global de cette fourche ZF est plus que satisfaisant.  Avec les évolutions de la ZF 2023  je ne suis pas réellement sûr que l'argument de passer sur un modèle Racing pour uniquement bénéficier des éléments Kayaba soit une bonne idée (pour le pilote lambda). Car si la Kayaba apportera un vrai plus en termes de rigueur dans le rapide, elle sera tout de même plus dure (moins d'onctueuse) en début de course que la ZF et demandera de mettre du rythme pour l'apprécier à sa juste valeur. Honnêtement pour celui qui ne fait que de la rando (même assez sportive) la ZF fera parfaitement l'affaire.

Coté amortisseur, rien à redire sur le ZF qui fait le job parfaitement, même s'il n'est pas vraiment aidé par le pneu Maxxiss en monte d'origine que je trouve assez moyen. D'ailleurs, j'ai rapidement viré le Maxxiss pour le remplacer par un pneu arrière Borilli 7 days bien plus performant pour moi.

Ergonomie et agrément de pilotage 

Par rapport aux modèles 2023, le nouveau design des plastiques des ouïes de réservoir apporte un plus, car la moto semble plus étroite entre les jambes (bien que la forme du réservoir reste inchangé). Ces nouvelles ouïes rentrant un peu plus vers l'intérieur, elles ont en plus moins tendance à accrocher les branches et ronces baladeuses dans les sentiers étroits. 

Aperçu des nouvelles formes des ouïes de radiateur. Sur cette photo les protèges mains sont présents, mais ils ne sont pas fournis de série

Les seuls reproches qu'on pourrait faire à cette Beta 300RR, c'est d'une part la selle vraiment trop dure (au moins ça vous obligera à rouler debout) et d'autre part un rayon de braquage trop faible quand on veut faire demi-tour dans les chemins étriqués (ça vous obligera maitriser le pied anglais)  

Ce genre de chemins étroits met a l'épreuve le rayon de braquage trop faible de la Beta

Coté agrément de pilotage, malgré le fait que le moteur de la Beta soit équipé d'un balancier d'équilibrage (qui réduit notablement les vibrations moteur par rapport aux modèles des générations précédentes), les vibrations sont malheureusement encore un peu présentes et cela ce  ressent sur les cale-pieds et le guidon. Sur ce point, la Beta n'est pas encore au niveau des 2 temps autrichiens. 

Le réservoir de 9,5 litres offre une bonne autonomie. Mais il est à noter que le tube du robinet d'essence dans le réservoir remonte (trop) haut, ce qui entraine le passage en réserve relativement tôt alors qu'il reste pas mal d'essence dans le réservoir. Ce n'est pas dramatique, car c'est juste une habitude à prendre, ça permet d'anticiper la panne sèche avec sacrée marge). Mais en course ça peut être gênant et on vous conseille en compétition de rouler en permanence avec le robinet en position réserve pour éviter les mauvaises surprises en spéciale.

La passage sur la réserve d'essence se fait relativement tôt avec la 300

Un mot enfin sur le graissage séparé. Moi qui n'avais jamais roulé avec moto équipée de ce système, il faut bien dire que j'étais dubitatif quant à l'intérêt réel. Mais avec du recul au terme de ces 9 mois de roulage, je dois reconnaitre que c'est pas mal. Déjà ça fonctionne parfaitement et le graissage moteur semble être parfait, car par exemple, le silencieux d'échappement ne dégueulait pas d'huile. Ensuite ça permet partir rouler sur de longues distances sans avoir à se trimballer une fiole d'huile au cas où il faudrait refaire le plein d'essence en cours de journée. Je sais que certain retirent ce système de graissage séparé pour revenir au mélange, mais perso, je n'en vois pas l'intérêt, car c'est super confortable de ne pas se casser la tête à faire le mélange avant une sortie.

Conclusion  : point forts / points faibles de la Beta 300 RR 2023 

Si je devais en 2 mots définir cette Beta 300 RR  2023, ce serait  "facilité et plaisir".
Cette moto m'a réconcilié avec les 300 2 temps que je trouvais jusqu'alors trop exigeants physiquement (je leur préférais les 250 2T). C'est une bécane qui se laisse dompter sans forcer et qui s'adaptera à toutes les pratiques et niveaux (ballade, compétition, franchissement).  Avec ce millésime, les ingénieurs Beta ont réussi de force de rendre la 300 cm³ vraiment docile, mais pas insipide.  Si vous êtes un peu pointilleux et que vous trouvez un petit manque de force à bas régime au 300 cc, montez une couronne avec une dent de plus et basta !

Je valide cette Beta 300 RR 2023 !

Ce que j'aime aussi sur cette moto, c'est la simplicité de ce moteur traditionnel 2 temps (à carburateur).  Ça fait un peu vieux c** de dire ça, mais je sais qu'avec ce type de moteur, je suis capable de faire moi-même toute la mécanique ainsi que les divers réglages, sans avoir à me transformer en ingénieur informaticien. 

Si vous êtes adepte de franchissement, pensez à ajouter un ventilateur de refroidissement (disponible chez Beta pour 157€) car 1 ou 2 fois dans des parties difficiles, j'ai fait bouillir l'eau des radiateurs. Et remplacer le sabot moteur d'origine qui est un peu cheap par un sabot plus protecteur.

Qu'est-ce que je reprocherais à cette 300 RR ? Honnêtement, pas grand-chose, mais après 9 mois a son guidon, je relèverai tout même 3 points à améliorer : 

• La selle trop dure, ce qui rend ma moto inconfortable en position assise sur le long terme
• L'efficacité moyenne du balancier d'équilibrage qui ne filtre pas assez les vibrations  
• Le levier de frein avant est un peu trop dur à actionner (alors que le freinage est parfait) 

Vendue neuve au tarif de 9 390 €  et même si ce millésime 2023 a subi une augmentation de 650 € (après plusieurs années sans augmentations , la Beta est la moins onéreuse des 300 2 temps (hormis la 300 Rieju) du marché actuel. Encore donc argument en faveur de la Beta !

Mamma mia.... quel plaisir au guidon de cette bécane !

Pour les photos d'illustration de cet essai, Thomas, notre pilote essayeur du moment, portait  :

• une tenue Raven Verve
• un casque Raven Aspire
• un masque Raven Halcon avec écran miroir gris
• des bottes Raven Champion

Un grand merci à Yves et Felix de chez GP Motors pour la mise à disposition de cette moto pendant 9 mois.